ENTOMOLAND - ENTOMOLOGIE & MACROPHOTOGRAPHIE
L'ultramacrophotographie à balayage
Introduction
L'ultramacrophotographie à balayage : Voilà
bien une expression tordue ! En fait, si on la décompose, ce n'est pas
bien compliqué.
Macrophoto, vous connaissez déjà : Cela signifie
que l'on va photographier un tout petit sujet, ou un détail de celui-ci.
Ultramacro, ça veut dire "plus que macro".
On va chercher à agrandir au maximum le sujet. Selon moi, on peut parler
d'ultramacro à partir du rapport X2 (on agrandit 4 fois). Pour les agrandissements
extrêmes X20 ou X100 ou plus, on parlera plutôt de "microphoto".
Pour ces rapports, on utilisera d'autres matériels, comme des microscopes.
Balayage : Voilà le vrai terme intéressant
de cette technique. Ceci signifie, et vous le comprendrez dans la suite des
articles, que l'on va "balayer" le sujet avec une lumière,
et ce afin de régler le plus important problème de la macrophoto,
la "profondeur de champ" (vous vous souvenez ?).
L'objectif ultime de la technique que nous allons étudier est de photographier
n'importe quel objet, de très très près, en ayant la même
netteté partout (si si, c'est possible !).
Le matériel
Dans l'introduction, nous avons évoqué le fait
qu'il va falloir balayer le sujet avec un rayon de lumière. Ce rayon
de lumière devra avoir au maximum l'épaisseur de la profondeur
de champ, et comme on travaillera dans le noir, tout ce qui passera dans ce
rayon de lumière sera forcément net.
Fabrication des diapositives pour obtenir un rayon de lumière : Vous
allez prendre une diapositive dont vous ne vous servez plus (en plastique si
possible, c'est plus simple). Vous l'ouvrez (il n'y a juste que quelques points
de colle faciles à faire sauter avec un couteau).
Vous retirez le film (la photo), et à la place vous
allez coller 2 lames de rasoir en les espaçant de 0,2mm (cette valeur
de profondeur de champ vous permettant de photographier des sujets au rapport
X5, ce qui est déjà énorme). Pour cela, vous utiliserez
des jauges d'épaisseur, qui servent généralement aux mécaniciens
pour, par exemple, vérifier l'écartement des bougies de voiture.
Achetez 1 jeu (ou 2 c'est mieux) de ces cales dans un magasin de bricolage.
Ce n'est pas très coûteux.
Une fois les lames collées (de la super glue fait
très bien l'affaire, refermer la diapositive avec également de
la super glue. Soyez méticuleux lors du bricolage, afin d'obtenir une
fente la plus régulière possible.
Jauges
d'épaisseur
Diapo
d'origine
Diapo
ouverte, image retirée
Collage
des 2 lames de rasoir
Diapo
refermée
Source de lumière : Pour générer
le rayon lumineux, il faut une source de lumière. Le moyen le plus simple
est de vous procurer un projecteur de diapositives (le top, c'est 2 projecteurs,
car toujours pour éviter les ombres, il sera préférable
d'éclairer des 2 côtés). Si vous avez pu trouver 2 projecteurs
(faites le tour des brocantes ...) de préférence de la même
puissance, il faudra bien évidemment fabriquer 2 diapositives identiques.
L'objectif de ces projecteurs (50mm ou autre, regardez, c'est
marqué dessus) devra pouvoir être dévissé (c'est
le cas de la plupart des projecteurs) afin de pouvoir les inverser (on expliquera
cela dans l'article parlant de la technique).
Système de guidage : Le plus délicat,
mais à la portée de tout bricoleur en herbe pour peu qu'il soit
méticuleux, est de fabriquer un système de guidage, sur lequel
sera fixé l'objet à photographier, et qui permettra de faire passer
le sujet dans le rayon de lumière.
Il est impératif que ce système de guidage
soit parfaitement régulier, sans à-coups ou soubresauts. C'est
la régularité du mouvement qui assurera la netteté sur
tout le sujet.
Toutes les solutions sont bonnes à priori. Pour mon
premier montage, j'avais utilisé un petit étau poussé
par une visse "sans fin". Le sujet était fixé sur une
des 2 mâchoires de l'étau, et la vis de serrage des mâchoires
permettait de faire avancer ou reculer le sujet. Cela donnait quelque chose
comme ça :
Premier montage
L'insecte est fixé sur une épingle, qui elle-même
est fixé par collage sur la mâchoire libre de l'étau. Lorsque
l'on visse la vis sans fin (en noir), la mâchoire libre avance, et vice
et versa.
Bon, ce n’était pas top, mais j'ai fait de bonnes
photos ainsi. Le tout est de bien vérifier que le guidage soit assez
précis pour que l'insecte ne bouge pas d'un poil.
Pour mon second essai, j'avais récupéré
une glissière sur roulements à billes. Le mouvement était
alors beaucoup plus fluide et avec moins d'à-coups.
Deuxième
montage
Ici, on pousse ou on tire le rail vert avec la main, d'un
mouvement le plus régulier possible. Le sujet (en bleu) suit le mouvement.
Mais je n'étais toujours pas satisfait, car le guidage
n'était pas parfait. Le rail déviait parfois de 1 ou 2 dixièmes
de millimètres. Et alors me direz-vous ? Et bien un écart de 1/10ème
de millimètre suffit à faire en sorte qu'à très
fort grossissement, le sujet n'est plus net ! Mais encore une fois, j'ai fait
de très chouettes photos ainsi.
Je viens de monter une troisième maquette, et là
ça devient sérieux ! Et le pire est que cette solution est sûrement
plus facile à mettre en œuvre pour tout un chacun. Effectivement,
j'ai récupéré un scanner qui ne fonctionnait plus. Dans
les scanners, vous pouvez remarquer que le plateau balayant le document à
scanner (et supportant le faisceau laser) est guidé par 2 barres rondes
et parfaitement parallèles (donc aucune déviation). Vous avez
dit "balayé" ? Et bien oui, le système du scanner est
particulièrement adapté à l'ultramacro à balayage,
car le principe est le même, sauf que dans un scanner, c'est la lumière
qui se déplace sur un sujet fixe (le document), et qu'en ultramacro à
balayage, c'est l'inverse (car c'est plus simple).
J'ai enlevé la partie supérieure de l'appareil
(qui est vitrée), et l'électronique qui ne me servait à
rien. Pour la partie motorisation, nous en reparlerons plus loin. Sur le plateau
coulissant, j'ai fixé une rotule (comme celles qui se trouvent sur les
pieds photos, et que l'on peut acheter séparément). Cette rotule,
sur laquelle j'ai monté un petit plateau qui recevra le sujet à
photographier, permet tous les mouvements (rotation, avant, arrière),
ce qui facilitera le cadrage du sujet dans l'objectif.
A l'avant du scanner, j'ai fixé un support sur lequel sera monté
l'appareil photo. L'intérêt de cette solution est que tout l'ensemble
est solidaire et assez lourd pour éviter les vibrations.
Vue
générale troisième montage
Sur la photo ci-dessus, on peut voir le montage avec le scanner.
Le bloc sur lequel vous distinguez le support contenant le sujet à photographier
(ici un timbre poste) coulisse sur les 2 guides parallèles. L'appareil
photo est fixe. Les 2 projecteurs sont perpendiculaires à l'appareil
photo, et leurs objectifs sont montés à l'envers. Sur le projecteur
de droite, j'ai collé un bout de tuyau de PVC qui permet de maintenir
l'objectif en place. Sur celui de droite, je n'ai pas encore mis le bout de
tuyau, et l'objectif peut tenir avec du scotch. On distingue sur la droite de
l'appareil photo la télécommande.
Vue
détaillée troisième montage
Sur ce plan rapproché, on peut voir les 2 types de
supports qui ont été prévus. D'abord une rotule de pied
photo, avec un petit plateau de bois fixé dessus. Cette rotule va permettre
le positionnement précis de l'objet dans l'objectif, par rotation ou
translation, mais pas en hauteur. Le deuxième support, devant la rotule,
n'est autre qu'un bouchon de liège, me permettant de piquer une épingle
qui portera le sujet.
Revenons à la partie moteur. L'avance du sujet dans
le rayon lumineux peut se faire soit manuellement (sous réserve d'arrêter
le Pastis à 8 heures du matin pour ne pas trembler), soit avec un moteur.
Mais le moteur, pour permettre de faire varier la vitesse à la demande
(toutes les photos ne pourront pas être prises à la même
vitesse, car cela dépendra de la lumière, de l'ouverture etc.),
devra être couplé avec un variateur, et ce n'est pas toujours facile
à mettre en œuvre. Pour ma part, je préfère l'avance
manuelle, d'autant plus qu'avec mon système, on va balayer très
rapidement le sujet, ce qui permet d'être régulier.
Des systèmes plus sophistiqués peuvent être
montés avec des matériels plus précis, mais pour avoir
cherché, je vous prédis que la carte bleue va chauffer !!!
Bon, côté matos, ça suffit. Vous voyez
que l'imagination n'a pas de limite, et cette période de mise au point
permet de comprendre beaucoup de choses. Et oui, il faut être patient
pour faire de l'ultramacro à balayage.
La technique
On sait qu'à des rapports de grossissements supérieurs
à X1 (qui est déjà un grossissement de 2 fois) la zone
de netteté est réduite de façon très importante.
Mais il en reste un peu tout de même ! Le but va donc être de faire
en sorte que l'objectif ne puisse voir QUE la zone de netteté. Ensuite,
il suffira de déplacer l'objet dans cette zone de netteté pour
que tout soit net. Il faudra donc travailler dans le noir, afin que la seule
source de lumière soit celle que l'on a créée. Plus facile
à dire qu'à faire ...
Théoriquement, il faudrait calculer la profondeur
de champ (la zone qui sera nette) pour la photo que l'on désire faire.
Ceci déterminerait l'épaisseur du rayon lumineux à générer.
Cela voudrait dire qu'il faudrait fabriquer autant de diapositives (voir article
L'ultramacro à balayage - Matériel) que de profondeurs de champ
possible !
Moi, je suis fainéant de nature ! J'ai donc décidé
de ne pas me creuser la tête en recalculant la profondeur de champ pour
chaque photo. Je me base sur une profondeur de champ faible mais fixe de 0,2
mm. Lorsque vous aurez compris la technique, vous vous rendrez compte que "qui
peut le moins peut le plus", à savoir que plus on se base sur une
profondeur de champ faible, plus on pourra photographier de sujets, qu'ils soient
gros ou petits, sans changer les réglages. Montez donc en permanence,
pour commencer, les diapositives de 0,2mm que vous avez fabriquées.
Ensuite, dévissez l'objectif de votre (ou de vos)
projecteur(s) de diapo, et mettez l'objectif A L'ENVERS. Ceci permettra de focaliser
la lumière (comme une loupe), et d'obtenir un rayon très fin.
Vous êtes prêt a faire un essai : Allumez votre projecteur, et visionnez
votre diapo bricolée. Approchez le projecteur d'un objet, jusqu'à
obtenir le rayon de lumière le plus fin possible. Il faut trouver la
position qui donnera cette finesse. Trop loin ou trop près de l'objet,
et le rayon regrossit. Pour vous donner une idée, l'objectif du projecteur
doit se trouver à environ 15 centimètres de l'objet. Cela dépend
de l'objectif du projecteur (cela peut être un 50mm ou encore un 85mm).
Le top du top, c'est de trouver 2 projecteurs (identiques
si possible, mais pas obligatoirement). Effectivement, si l'on éclaire
l'objet que d'un seul côté, l'autre côté sera dans
l'ombre.
On a maintenant la lumière, et c'est le principal.
Vous allez maintenant positionner votre petit sujet à
photographier sur le plateau ou sur le liège à l'aide d'une épingle
(notamment pour les insectes). Cette étape est souvent la plus longue,
car c'est ici que va intervenir votre vrai talent de photographe. Choisissez
très précisément la position du sujet ou de la partie que
vous voulez photographier.
Tout en visant à travers l'objectif, faites avancer
ou reculer l'objet afin de faire la mise au point, et vérifiez avec beaucoup
de soin le cadrage. Lors du défilement de l'objet, tout ce que vous voulez
photographier rentrera-t-il dans le viseur ?
Une fois cela fait, faites bouger vos projecteurs en les
éloignant ou en les rapprochant du sujet de façon à ce
que les rayons lumineux soient le plus fin possible. Ensuite, bougez-les en
les éloignant ou en les rapprochant de l'appareil de façon à
ce qu'ils se rencontrent parfaitement sur la partie du sujet sur laquelle vous
avez effectué la mise au point.
Maintenant, au travers du viseur de l'appareil, améliorez
la mise au point en tournant légèrement la bague de l'objectif.
La partie de l'objet éclairée par le rayon de lumière doit
être PARFAITEMENT NETTE. Prenez votre temps, ce n'est pas toujours évident.
Une fois cela fait, si vous faites avancer ou reculer le sujet, tout ce qui
passe dans le rayon lumineux doit être aussi net (et c'est là que
c'est magique !). Pour vous aider lors de cette mise au point, éteignez
toutes les lumières ambiantes (j'ai bien dit ambiantes, pas les projecteurs !!!).
Bon, on se la fait, cette photo ? Ben oui, y a plus qu'à
!
Réglez votre appareil sur "pause longue".
Regardez la documentation de votre appareil, et rechercher les termes "pose
longue" ou "pose B" ou "Bulb". Tous ces termes signifient
que l'on va ouvrir l'objectif, mais qu'il ne se refermera qu'à notre
demande, lorsque tout l'objet ou la partie de l'objet désirée
sera passé dans le rayon de lumière. Sur mon appareil, je sélectionne
le mode "M" "Manuel", et je fais varier la vitesse jusqu'à
l'affichage du mot "Bulb".
Sortez l'objet du rayon lumineux en avançant ou en
reculant le support. Si vous ne l'avez pas encore fait, éteignez toutes
les lumières sauf les projecteurs. Appuyez sur le déclencheur
de l'appareil (ou de la télécommande si vous en avez une). L'objectif
reste ouvert, puisque vous êtes en pause longue. Faites défiler
l'objet dans le rayon lumineux (c'est là qu'il faut éviter absolument
toute vibration ou à-coup, sous peine de flou). Pour la vitesse de passage,
il faudra faire des essais. Plus vous irez doucement, plus l'objectif captera
de lumière (donc trop doucement = surexposition et trop vite = sous-exposition).
Avec mon système, je passe assez vite dans le rayon de lumière.
Lorsque le sujet (ou la partie que vous vouliez photographier) est entièrement
passée dans le rayon lumineux, appuyez à nouveau sur le déclencheur
de l'appareil ou de la télécommande. L'objectif (le diaphragme)
va se refermer.
Et voilà, c'est dans la boîte ! Si vous avez
un appareil numérique, n'hésitez pas à multiplier les essais
en faisant varier la vitesse de passage. Vous ne garderez que la meilleure photo.